Nicolas Crunchant, un des fondateurs de Destinations Queyras, écrivain et accompagnateur a prêté sa plume pour vous faire découvrir le Queyras sous un angle bien particulier : celui du loup.
Le Queyras
Avec ceux de ma meute, j’ai sillonné pendant des heures mon vaste territoire à la recherche de nourriture, humant l’odeur des chevreuils comme celle des brebis protégées dans leur enclos, prêtant l’oreille aux moindres rumeurs de la nuit, bondissant en un éclair sur un campagnol trop téméraire...
Mais à présent, l’aube commence à colorer l’horizon et il est temps pour moi, comme pour ma compagne et pour les deux jeunes loups qui nous suivent docilement, de rejoindre les abords de la tanière, de l’autre côté de la vallée, à l’écart des sentiers, des lacs et des bergeries. |
Le domaine sur lequel je règne est immense. Il s’étend sur tout l’est du Queyras, sur plus de 250 Km2, de l’adret baigné de soleil qui domine le village de Ville-Vieille jusqu’aux crêtes frontalières où, en plein été, il nous arrive de chasser les mouflons.
À la tombée du soir, comme un inévitable rituel, j’entraîne la petite meute derrière moi et je choisis la direction à prendre en fonction des conditions météorologiques, de la saison… et de mes aspirations. Oui, de mes aspirations, car, je l’avoue, j’ai un petit faible pour le vallon des lacs, cette longue combe qui s’étire du hameau de l’Échalp jusqu’au pied du Pain de Sucre, à plus de 3000 mètres d’altitude !
À la tombée du soir, comme un inévitable rituel, j’entraîne la petite meute derrière moi et je choisis la direction à prendre en fonction des conditions météorologiques, de la saison… et de mes aspirations. Oui, de mes aspirations, car, je l’avoue, j’ai un petit faible pour le vallon des lacs, cette longue combe qui s’étire du hameau de l’Échalp jusqu’au pied du Pain de Sucre, à plus de 3000 mètres d’altitude !
Même si nous en revenons souvent bredouilles, car les proies y sont méfiantes et véloces, c’est un vrai bonheur pour moi d’y mener mes troupes. J’aime me faufiler sans un bruit à proximité de la cabane où dorment la bergère et ses chiens. C’est un sentiment de liberté inexplicable qui me pousse ensuite à remonter allègrement l’alpage, à trottiner sur le sentier qu’emprunteront bientôt les hommes et à me désaltérer enfin à l’eau fraîche du lac Égorgéou.
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Lorsque je divague ensuite entre les barres rocheuses et les parterres de fleurs, je devine parfois les silhouettes imposantes des bouquetins aux longues cornes qui somnolent, intrépides, sur d’étroites vires rocheuses que je suis incapable de rejoindre. Quelquefois, je surprends une harde de chamois qui s’éclipse en un clin d’œil en bondissant à travers la montagne sans nous laisser la moindre chance de nous emparer d’une proie.
D’autres fois encore, étonné, tandis que les loups dominés attendent mes consignes, j’observe longuement le reflet de la lune dans le miroir du lac Foréan. |
Je suis le seigneur de ces lieux, le maître des étendues d’eau figée, du torrent tumultueux, des bosquets de mélèzes et des alpages déserts. Tout m’appartient, jusqu’au col Vieux et aux pierriers d’altitude où je débusque les lièvres variables et l’armée des petits rongeurs. Tout m’appartient, certes, mais uniquement avec la complicité de la nuit.
Car lorsque pointe l’aurore, à pas de loups, forcément, je retourne avec les miens dormir, jouer, rêvasser sous les taillis protecteurs qui entourent notre tanière, du côté du col Lacroix. La vallée des lacs, le jour venu, devient la propriété des hommes. Les randonneurs partent à l’assaut des sommets, franchissent les cols d’altitude, descendent le sentier en direction de la vallée, pique-niquent au bord des lacs, partagent quelques instants avec la bergère et s’émerveillent eux aussi de l’atmosphère unique qui se dégage de ce territoire préservé.
Finalement, ils sont un peu comme moi : sans s’en rendre compte, sans être en mesure de résister à ses charmes, ils se laissent envoûter par la magie du vallon du lac !
Car lorsque pointe l’aurore, à pas de loups, forcément, je retourne avec les miens dormir, jouer, rêvasser sous les taillis protecteurs qui entourent notre tanière, du côté du col Lacroix. La vallée des lacs, le jour venu, devient la propriété des hommes. Les randonneurs partent à l’assaut des sommets, franchissent les cols d’altitude, descendent le sentier en direction de la vallée, pique-niquent au bord des lacs, partagent quelques instants avec la bergère et s’émerveillent eux aussi de l’atmosphère unique qui se dégage de ce territoire préservé.
Finalement, ils sont un peu comme moi : sans s’en rendre compte, sans être en mesure de résister à ses charmes, ils se laissent envoûter par la magie du vallon du lac !